mercredi 27 juillet 2016

Saint Jean de Capistran

« Mais la grande merveille de Jean de Capistran, celle qui va devenir le couronnement de sa glorieuse vie, celle qui, dans l'histoire de l'Eglise, le classe parmi les héros chrétiens, c'est la célèbre victoire qu'il remporta à Belgrade sur les Turcs, en 1456.
Constantinople venait de tomber au pouvoir des Musulmans. C'était la destruction, le carnage, la barbarie qui menaçaient l'Europe désunie, indécise, insouciante et plongée dans un état de dépression générale.

En vain le Vicaire de Jésus-Christ avait-il jeté le cri d'alarme; en vain consacrait-il à équiper des troupes les dîmes du clergé, les trésors de l'Eglise, l'or des vases sacrés: les rois le trahissaient ou faisaient mine de ne pas entendre sa voix.

"Nos rois sommeillent et les peuples languissent, écrivait à Capistran le Légat du Pape, Aénéas Sylvius,nous cédons tous à la tempête. Les chefs des nations sont timides et divisés; reprenez leur paresse, leur orgueil, leur avarice."
Jean de Capistran seul ne désespérait pas. "Moi, petit ver de terre, répondait-il au Souverain Pontife, je me prosterne aux pieds de Votre Sainteté afin qu'elle dispose de moi. Bien qu'accablé de vieillesse et n'ayant à offrir ni or ni argent, j'ai résolu d'exposer ma vie et de donner mon sang pour le Nom du Christ".

Ecrire et parler, lutter et mourir, Jean de Capistran y était prêt. Ses lettres aux princes se succèdent sans interruption. Il fait appel à leur foi, à leur honneur, à leur courage, à l'intérêt de leurs états. Puis il se met à parcourir la chrétienté. L'Allemagne, il est vrai, resta sourde à sa parole; mais la Hongrie se décida à la sainte croisade.

Il était temps. Les Turcs, avec une formidable armée, s'avançaient pour assiéger Belgrade. Capistran se hâte d'enrôler les Croisés dont Jean de Hunyade, vaillant capitaine, est le général. Tous, cependant, chef et soldats, d'obéir à Capistran "comme un novice à son supérieur".
Un signe d'En-Haut prédit la victoire. Pendant que Jean célèbre la Sainte Messe, une flèche tombe du ciel sur l'autel. Elle portait ces mots: "Jean, ne crains rien. Par la vertu de mon Nom, tu vaincras".

Jean impose la croix à tous ses combattants, fait peindre sur les étendards le nom du Christ et les images de saint François, de saint Antoine, de saint Bernardin.
Sous le signe de Dieu, la bataille va commencer. Au signal donné, les chrétiens se précipitent sur les Musulmans. Un effroyable choc se produit, une épouvantable mêlée s'engage. Le saint se jette au plus fort du combat répétant mille fois ce cri: "Victoire! Jésus, victoire!" Le nom de Jésus va se répercutant de lèvre en lèvre dans l'armée des Croisés, dont Il centuple les forces. Le saint voulait que devant ce Nom, qui doit tout faire fléchir, l'Islam s'enfuit, et il le vit s'enfuir.
Quatre mille chrétiens sortant soudainement de Belgrade sèment la panique dans les rangs ennemis: Mahomet est blessé et son armée, en déroute, laisse après elle sur le champ de bataille quelques 100,000 cadavres. La chrétienté était sauvée.

Quelques semaines plus tard, Hunyade mourait entre les bras de Capistran. Ce dernier, lui aussi victime de l'épidémie causée par l'accumulation des cadavres, devait le suivre de près dans la tombe. Brisé par les fatigues incessantes de l'apostolat, dans la pleine gloire de son dernier triomphe, âgé de plus de 70 ans, le 23 octobre 1456, il rendait à Dieu sa belle âme de héros.

Tel fut Jean de Capistran: soldat de la Croix, disciple de saint Bernardin, fils de saint François.
Nicolas de Fara, son contemporain et premier biographe, l'appelle: "Un autre Paul enseignant aux nations le royaume de Dieu, faisant triompher le Nom béni de Jésus, repoussant du glaive de la parole les ennemis de la doctrine, ramenant au Christ, vrai pasteur, un nombre incalculable d'hérétiques, de schismatiques, de Juifs et de pécheurs. Heureux, ajoute-t-il, celui qui a peut voir de ses yeux un tel homme: il fut l'astre brillant de notre siècle, la gloire des Frères Mineurs, l'honneur de l'Italie, la force des Hongrois, la terreur des Turcs, l'invincible lutteur et le rempart de la chrétienté."



-Père Bertrand, O.F.M., Moissonneurs franciscains, Librairie Saint-François, Montréal, 1930.