Extrait de La grande Christologie (Chapitre II, IIième Colonne, VII) par l'abbé Maistre
Moïse
ayant parlé de l'Esprit-Saint et de plusieurs personnes divines; Salomon ayant
développé assez au long la doctrine du Verbe, il n'est pas étonnant que des Païens en aient eu quelques notions, plus ou moins exactes, d'autant plus, que,
depuis leur captivité, les Juifs se trouvaient en relation avec presque tous
les peuples de l'Orient. Il y avait longtemps que Job, que Moïse, que Salomon,
que les Prophètes, et les Docteurs hébreux avaient disserté sur le Verbe Divin,
lorsque vers le IVe ou IIIe siècle
avant Jésus-Christ, on entendit Platon, Aristote, Pythagore, Parménides, et
d'autres Philosophes, essayer de dogmatiser sur Dieu, sur son Verbe, et même
sur un Troisième Principe. Ils n'étaient que les échos de la Tradition
Prophétique. Toutefois, ce qu'ils ont dit sur ces grands sujets, quoique
obscurément et d'après les Livres Saints, ne fait que confirmer ce qu'avaient
dit et écrit avant eux les Anciens Prophètes.
Platon
Platon |
Voici
ce que nous lisons dans la Seconde Epître de Platon à Denys, p. 707 :
— «
Vous dîtes que je ne vous ai pas assez démontré la Première Nature (ou
le Premier Etre). Il faut donc vous en parler par énigmes, afin que si
cette lettre tombe entre les mains de quelqu'un, il n'y comprenne rien. Voici
le vrai. Toutes choses sont autour du
Roi de tout, et tout est pour lui ; il est la cause de tout ce qui est beau. —
Les Secondes sont autour du Second, et les Troisièmes autour du Troisième. Circa
omnium Regem cuncta sunt...; circa Secundum secunda; tertia circa Tertium. L'Esprit
Humain cherche à comprendre la manière dont cela est, en considérant ce qui
lui est connu; mais rien ne peut y suffire; il n'y a rien de semblable dans
le Roi et dans ceux dont j'ai parlé. »
Dans
sa lettre à Hermias, à Eraste et à Corisoüs, il nomme Dieu le Chef de tout
ce qui est et de tout ce qui sera, et le Seigneur, Père du Chef et du Principe
: testando Deum, omnium rerum ducem, quae sunt et quae futura sunt, ac Ducis et
Principii Patrem Dominum. Ailleurs, il appelle le Second Principe,
l'Intelligence Royale, Mentem Regiam, l'Ame Souveraine, qui est en possession
du commandement, Animam imperatoriam. Il dit qu'Elle est engendrée de la
Cause Suprême; qu'Elle est d'une nature semblable, identique. — Dans sa République,
6, il l'appelle le Fils du Bon, Boni ipsius filium. Dans son Timée,
il le définit le Modèle Divin, le Type Eternel.Ainsi, l'une des plus hautes intelligences humaines, Celui qu'on nomme le divin Platon, livré à lui-même, a estimé que concevoir Dieu trinaire en personnes, et unique en substance, était la meilleure manière de le comprendre. Elle porte donc un évident caractère de vérité, cette Révélation Chrétienne, dont l'enseignement est conforme à ce que dictait la Raison la plus pure et la plus élevée qui ait jamais brillé dans le Paganisme.
Aristote, — Pythagore, — Parménide, — Héraclides de Pont,
etc. (350 ans avant J.-C)
Ces
Anciens Philosophes, qui voyageaient beaucoup et longtemps, ont pu et dû, comme
Platon, puiser, soit dans les Livres Sacrés, soit dans leurs entretiens avec
les Hébreux, quelques notions de Dieu, de Son Verbe et d'une Troisième
Hypostase Divine, puisque dès les temps de Salomon, de Job et de Moïse,
cette doctrine était assez répandue dans la Palestine et les pays limitrophes.
Aristote |
Théocrite, poète grec, qui vivait près de 300 ans avant Jésus-Christ, dit dans sa deuxième idylle : AD TER LIBO, ET TER HAEC VENERABILIA CLAMO.
Voyez aussi Virgile, Eglog. VIII, sur le même nombre employé dans les Sacrifices.
Dans
le Pémandre de Mercure-Trismégiste, C. I, III et VII, on trouve des notions des
trois personnes divines, comme le font remarquer S. Cyrille, contra
Julianum, et Suidas, in Mercurio. Ces deux écrivains ecclésiastiques
en ont cité plusieurs passages dans leurs écrits.
Phérécide,
le Syrien,
reconnaissait aussi trois Dieux, unis ensemble. (Proclus.)
On
rapporte la même chose d'Orphée (in Argonauticis, apud Clem., I. V, Strom.).
Selon
les Mages de la Perse, les trois principes, Oromase, Mithra et Arimane, ne
sont autre chose que Dieu, l'Intelligence, et l'Ame.
Pythagore |
Parménides
admettait,
comme Platon, trois natures, ou trois Hypostases, dans la Divinité. (In
Cosmogonia. )
Héraclides
de Pont, disciple
d'Aristote (an 336 avant Jésus-Christ), rapporte un oracle de Sérapis,
qui indique positivement la Trinité.
Porphyre,
ce fameux
philosophe, ennemi acharné de l'Eglise, nous a transmis l'oracle païen, dont
parle Héraclides. Le voici : « D'abord Dieu, ensuite le Verbe, puis l'Esprit avec
eux; Ces trois sont de même nature, sont réunis et coexistent en un. » (Serapis ad Thulem Regem, Apud Suidam in
Thulis).
La
célèbre Chronique d'Alexandrie, p. 16, rapporte une réponse semblable
faite par l'Oracle Egyptien au roi Thul, qui avait poussé ses conquêtes jusqu'à
l'Océan. Lorsqu'il
fut rentre triomphalement en Egypte, le monarque victorieux offrit un
sacrifice, et consulta l'Oracle en ces termes :
«
Dic, inquit, Ignipotens, Veridice, Beate, qui coeli cursum temperas,
quis ante me potuit sibi subjicere omnia: aut quis poterit post me? »
RÉPONSE
DE L'ORACLE :
«
Ipse Deus primum, dein, Juncto Flamine, Verbum;
Haec tamen existunt Simul Omnia, et Omnia in
unum.Distinctim veniunt : cujus sine fine potestas :
Tu certo incertum vitae pede dirige Callem. »
Après
avoir exprimé les Trois Hypostases Divines, qui ne sont qu'un seul tout unique,
l'Oracle prédit la mort imprévue du Roi, qui, peu après être sorti du Temple,
fut effectivement tué en Afrique dans une embuscade dressée par les siens. (Vide Biblioth. SS. Patrum, tom. xv, p. 16.)