La base électorale des Canadiens français.
« Notre pays, soumis au
régime constitutionnel, aura dans peu de temps à choisir ses représentants. Ce
simple fait soulève nécessairement une question que notre devoir de journaliste
catholique nous oblige de résoudre, et cette question doit se poser comme suit
:
Quelle doit être l'action des électeurs catholiques dans
la lutte qui se prépare, et quelle doit être leur ligne de conduite dans le
choix des candidats qui solliciteront leurs suffrages ?
Nous croyons pouvoir répondre à cette question d'une
manière satisfaisante en donnant quelque développement aux idées exprimées par
Sa Grandeur Mgr l'Evêque des Trois-Rivières dans sa dernière Lettre Pastorale.
Voici les lignes que nous y trouvons :
« Les hommes que vous envoyez vous représenter dans la
législature sont chargés de protéger et de défendre vos intérêts religieux,
selon l'esprit de l'Église, autant que de promouvoir et sauvegarder vos
intérêts temporels. Car les lois civiles sont nécessairement en rapport sur un
grand nombre de points avec la religion. C'est ce que les pères du Concile
disent clairement dans leur décret.
Vous devez donc vous assurer prudemment que le candidat à
qui vous donnez vos suffrages est dûment qualifié sous ce double rapport et
qu'il offre, moralement parlant, toutes les garanties convenables pour la
protection de ces graves intérêts.
Nous devons sans doute rendre grâce à Dieu de la pleine et
entière liberté que la constitution de notre pays accorde en droit au culte
catholique de se régir et de se gouverner conformément aux règles de l'Église.
C'est par un choix judicieux de vos législateurs que vous
pourrez vous assurer la conservation et la jouissance de cette liberté la plus
précieuse de toutes, et qui doit donner à vous premiers pasteurs l'immense
avantage de pouvoir gouverner l'Église du Canada selon les prescriptions et
directions immédiates du Saint-Siège et de l'Église romaine, la mère et la
maîtresse de toutes les églises. »
Ces conseils dictés par la sagesse, seront compris, nous
l'espérons, par tous les électeurs catholiques de la Province de Québec. Il est
impossible de le nier, la politique se relie étroitement à la religion, et la
séparation de l'Église et de l'État est une doctrine absurde et impie. Cela est
particulièrement vrai du régime constitutionnel qui, attribuant au parlement
tout pouvoir de législation, met aux mains de ceux qui le composent une arme à
double tranchant qui pourrait être terrible.
C'est pourquoi il est nécessaire que ceux qui exercent ce
pouvoir législatif soient en parfait accord avec les enseignements de l'Église.
C'est pourquoi il est du devoir des électeurs catholiques de choisir pour leurs
représentants des hommes dont les principes soient parfaitement sains et sûrs.
L'adhésion pleine et entière aux doctrines catholiques
romaines en religion, en politique et en économie sociale, doit être la
première et la principale qualification que les électeurs catholiques devront
exiger du candidat catholique. C'est le criterium le plus sûr qui devra leur
servir à juger des hommes et des choses. On comprend qu'il ne peut être ici
question des protestants auxquels nous laissons la même liberté que nous
réclamons pour nous-mêmes.
Ces prémisses posées, il est facile d'en déduire des
conséquences qui serviront de guide aux électeurs. Mais pour établir des règles
pratiques dont l'application soit facile, il faut tenir compte des
circonstances particulières où notre pays est placé, des partis politiques qui
s'y sont formés et de leurs antécédents.
Nous appartenons en principe au parti conservateur,
c'est-à-dire, à celui qui s'est constitué le défenseur de l'autorité sociale.
C'est assez dire que par le parti conservateur nous n'entendons pas toute
réunion d'hommes n'ayant d'autre lien que celui de l'intérêt et de l'ambition
personnelle, mais un groupe d'hommes professant sincèrement les mêmes principes
de religion et de nationalité, conservant dans leur intégrité les traditions du
vieux parti conservateur qui se résument dans un attachement inviolable aux
doctrines catholiques et dans un dévouement absolu aux intérêts nationaux du
Bas-Canada.
Dans la situation politique de notre pays, le parti
conservateur étant le seul qui offre des garanties sérieuses aux intérêts
religieux, nous regardons comme un devoir d'appuyer loyalement les hommes
placés à sa tête.
Mais ce loyal appui doit être subordonné aux intérêts
religieux que nous ne devons jamais perdre de vue. Si donc il existe dans nos
lois des lacunes, des ambiguïtés ou des dispositions qui mettent en péril les
intérêts des catholiques, nous devons exiger de nos candidats un engagement
formel de travailler à faire disparaître ces défauts de notre législation.
Ainsi, la presse religieuse se plaint avec raison que nos
lois sur le mariage, sur l'éducation, sur l'érection des paroisses et sur les
registres de l'état civil sont défectueuses, en ce qu'elles blessent les droits
de l'Eglise, gênent sa liberté, entravent son administration ou peuvent prêter
à des interprétations hostiles. Cet état de choses impose aux députés
catholiques le devoir de les changer et modifier selon que Nos Seigneurs les
Evêques de la Province pourraient le demander afin de les mettre en harmonie
avec les doctrines de l'Eglise catholique romaine. Or, pour que les députés
s'acquittent plus diligemment de ce devoir, les électeurs doivent en faire une
condition de leur appui. C'est le devoir des électeurs de n'accorder leurs
suffrages qu'à ceux qui veulent se conformer entièrement aux enseignements de
l'Eglise relativement à ces matières
Concluons donc en adoptant les règles générales suivantes
dans certains cas données.
1. Si la lutte se fait entre deux conservateurs, il va
sans dire que nous appuierons celui qui acceptera
le programme que nous venons de tracer.
le programme que nous venons de tracer.
2. Si, au contraire, elle se trouve engagée entre un
conservateur d'une nuance quelconque, et un adepte de l'école libérale, nos
sympathies actives seront pour le premier.
3. Si les seuls candidats qui s'offrent à nos suffrages
dans un comté sont tous libéraux ou oppositionnistes, nous devons choisir celui
qui souscrira à nos conditions.
4. Enfin, dans le cas où la contestation serait engagée
entre un conservateur rejetant notre programme et un oppositionniste quand même
l'acceptant, la position serait plus délicate. Voter pour le premier serait
nous mettre en contradiction avec la doctrine que nous venons d'exposer. Voter
pour le second serait mettre en péril ce parti conservateur que nous voudrions
voir puissant. Quel parti prendre entre ces deux dangers ? Nous conseillerions
alors l'abstention des électeurs catholiques.
On comprend néanmoins que ces règles posées laissent
encore aux électeurs une certaine liberté d'action qui dépendra des
circonstances particulières de chaque comté et des antécédents de chaque candidat.
Au reste, nous avons tenu à mettre surtout en évidence les convictions et les
qualifications religieuses que les électeurs doivent exiger de ceux qui
sollicitent leurs suffrages. Il est utile d'ajouter que pour faire prévaloir
leurs convictions religieuses, il faut chez les députés l'intelligence et
l'instruction. Après s'être assurés des principes religieux des candidats, il
faudra donc en second lieu s'efforcer de faire parvenir en chambre la plus
grande somme possible d'intelligence et d'instruction
Nous réprouverions donc toute action ministérielle qui
tendrait à éliminer de l'arène parlementaire des hommes capables de rendre
service à la cause catholique et nationale, sous le prétexte qu'ils gêneraient
quelques ambitions. Composer la représentation de ministres dociles et
impuissants serait certainement un grand mal qu'il faut éviter.
En deux mots, nous voulons sauvegarder à la fois l'honneur
de la Patrie et la liberté de l'Eglise, et tout notre programme peut se résumer
dans ce mot: « Religion et Patrie » .
Le Journal des Trois Rivières, le 20 avril 1871.
Le Journal des Trois Rivières, le 20 avril 1871.
À la lumière de ces informations,
est-ce que nous pouvons aujourd'hui, en l'an 2015, accorder des votes à un
quelconque parti soit provincial ou fédéral? Non. A l'époque, la grande
majorité de la population était catholique. Il était toujours possible de s'y
impliquer. De nos jours c'est tout le contraire. Il n'y a qu'une infime
minorité de catholiques et il n'est plus possible de s'y impliquer. Tout le
système politique et social a été verrouillé et cadenassé. Les médias sont les
chiens de garde du système. Prudence à celui qui voudrait faire de la politique
catholique! Il serait ignoré, humilié ou calomnié par des pseudos « tête à
Papineau » médiatiques, à la botte de la judéo-maçonnerie. Notre combat,
notre croisade comme disait Mgr Lefebvre, est tout autre. Il est à reconstruire
la cité catholique par ses fondements : familles pieuses, dévouement
généreux dans le travail, propagation de la doctrine catholique et l'amour de
la patrie. Bref, pour nous Canadiens-français, il est à conserver et promouvoir
ces si belles valeurs traditionnelles qui font de nous des Catholiques, des Français,
et qui nous ont permis de résister aux tempêtes tout au cours de notre
histoire. Afin qu'on puisse dire en 2016 que nous sommes d'un peuple qui ne
sait pas mourir. Courage! Tous au travail, le Canada-français renaîtra!