Le Cardinal Taschereau et le catholicisme libéral (1820-1898)
Un combat identitaire: L’Action française de Montréal
Le mouvement Tradition Québec tient a souligner deux ouvrages récents de monsieur Jean-Claude Dupuis, Ph. D, professeur d'histoire.
Il ne faut pas croire que la Révolution tranquille est née soudainement dans les années 1960. Le mal en Canada français était plus ancien. Dans les textes suivants, l'auteur met en lumière certaines de ses causes et de ses effets dévastateurs sur le peuple Français d'Amérique.
Le premier des documents, Le Cardinal Taschereau et le catholicisme libéral (1820-1898), est un condensé de la récente thèse de doctorat de ce dernier. En voici un court résumé:
Le cardinal-archevêque de Québec, Elzéar-Alexandre Taschereau (1820-1898), voulait préserver la relative bonne entente qui régnait entre l’Église catholique et l’État canadien dans la seconde moitié du XIXe siècle, malgré le difficile contexte de l’hégémonie anglo-protestante. Sa politique de pacification religieuse visait à instaurer entre l’Église et l’État un régime d’autonomie mutuelle et de collaboration pratique. Avec l’appui du Saint-Siège, il réussit à freiner le militantisme antilibéral de ses adversaires, Mgrs Bourget (Montréal) et Laflèche (Trois-Rivières), qui défendaient le principe de la suprématie de l’Église sur l’État.
À cette époque, un profond conflit idéologique opposait le catholicisme au libéralisme, la civilisation de la Loi de Dieu à la civilisation des Droits de l’Homme. Dans tous les pays, L’Église était divisée sur la manière de relever le défi de la modernité. Les catholiques ultramontains ou intransigeants combattaient les « funestes principes de 1789 » dans l’espoir de restaurer une société d’Ancien Régime fondée sur l’union du trône et de l’autel. Les catholiques libéraux ou modérés rêvaient également d’une société chrétienne de type médiéval, mais en vertu de la distinction entre la thèse (l’idéal) et l’hypothèse (la réalité), ils recherchaient une sorte de modus vivendi entre l’Église catholique et la société libérale, un régime « d’Église libre dans l’État libre » suivant la célèbre formule de Charles de Montalembert.
Mgr Taschereau adhérait à l’esprit de l’Église de son temps, marqué par le dogmatisme, l’autoritarisme et une certaine intolérance. En théorie, sa pensée ne s’écartait pas de la doctrine ultramontaine. Mais en pratique, son action s’inscrivait néanmoins dans une logique catholique libérale. Et le catholicisme libéral était une praxis avant d’être une doctrine. L’archevêque de Québec estimait que le libéralisme canadien était de nature strictement politique (forme élective de l’État) et qu’il ne se rattachait pas au libéralisme doctrinal européen (laïcisme et anticléricalisme), condamné par le Syllabus des erreurs modernes. En conséquence, l’Église devait se désengager des luttes électorales, tolérer certaines antinomies entre le droit civil et le droit canon, et limiter ses revendications pour ne pas troubler un statu quo somme toute favorable. « Il faut prendre les hommes tels qu’ils sont, disait Taschereau, et non tels qu’ils devraient être. »Les ultramontains reprochaient à Mgr Taschereau de défendre mollement les droits de l’Église, voire d’être plus ou moins entaché de libéralisme. L’historiographie a généralement rejeté les accusations des « ultramontés » en soulignant que la politique modérée de l’archevêque de Québec avait probablement épargné au Canada un grave conflit de races et de religions, qui eût sans doute tourné au désavantage de la minorité franco-catholique. Mais en séparant la politique de la religion, le cardinal Taschereau n’ouvrait-il pas inconsciemment la porte à un certain laïcisme? En définitive, sa politique de compromis a-t-elle renforcé ou affaibli la position de l’Église catholique au Québec et au Canada?
Le second, Un combat identitaire: L’Action française de Montréal, est un essai sur l'Action française de Montréal de l'abbé Lionel Groulx. Remontant dans les années 1920, l'auteur y démontre la doctrine prêchée par ce groupe. Le contraste avec notre Québec actuel est frappant. Un véritable manifeste contre la Révolution tranquille.
Dans les années 1920, L’Action française de Montréal était le flambeau intellectuel du nationalisme canadien-français. Cette revue mensuelle, dirigée par Lionel Groulx,
entendait « reconstituer la plénitude de notre vie française » dans une société de plus en plus marquée par l’influence de la culture matérialiste anglo-américaine. Son combat identitaire, à la fois conservateur et d’avant-garde, reposait sur l’union de la langue et de la foi, la reconquête économique et le projet d’indépendance politique. L’Action française conceptualisa un modèle de société alternatif à contre-courant du grand capitalisme industriel, qu’elle associait à « l’esprit anglo-saxon ». Son idéal de classicisme français, d’ordre latin et de spiritualité chrétienne critiquait radicalement une certaine vision de la modernité, fondée sur l’individualisme à tout crin. Abordant toutes les questions politiques, économique, culturelles et religieuses d’une société québécoise alors en pleine mutation, et déjà en marche vers la Révolution tranquille, L’Action française voulait unifier et orienter les efforts de survivance de la nation canadienne-française par une doctrine cohérente et mobilisatrice. La redécouverte de ce « nationalisme intégral » pourrait alimenter la réflexion contemporaine sur les fondements historiques et les valeurs identitaires d’une société québécoise qui semble être désespérément à la recherche de nouveaux points de repères.
Deux ouvrages repères pour tous les fidèles de la cause Canadienne-française. Nul besoin de dire que nous encourageons de vive voix leur lecture.
Vous pouvez télécharger ces deux études dans notre section livres.